ECL’OR (Engagement collectif pour l’orientation des jeunes) est à l’origine un projet partenarial entre la commune de Pouzauges (85), les entreprises locales et 2 collèges : Gaston-Chaissac (public) et un établissement privé.

Un entrisme du privé dans l’enseignement public
Initié en 2019/2020, ce projet devait “créer un lien entre établissements scolaires et professionnels du territoire, afin de valoriser les entreprises du territoire, d’anticiper leurs besoins et d’apporter aux jeunes un éclairage en vue de leur orientation (sic)”. Ce partenariat d’abord expérimenté avec des classes de 4^e, puis déployé avec des classes de 3^e, est désormais reconduit tous les ans. En 2022/2023, c’est au tour de Terres de Montaigu d’expérimenter Ecl’or avec les classes de 4^e avant de l’étendre aux classes de 3^e cette année. 18 entreprises et 4 collèges sont impliqués (Jules Ferry et Michel Ragon pour le public, 2 autres établissements privés). Tout au long de l’année scolaire, les élèves suivent des ateliers de connaissance de soi et du monde professionnel. Chaque classe est parrainée par un professionnel, représentant l’une des 18 entreprises, qui suit la classe pendant toute l’année en co-animant des ateliers et en organisant une visite d’entreprise.

Des raisons sérieuses de s’inquiéter
Tout d’abord, ce dispositif est chronophage pour tous les acteurs engagés : 9H dédiées au parcours sur l’année, 8H d’ateliers animés en classe dont une visite d’entreprise, 6H de formation avec les acteurs du parcours, 3H de préparation avec l’enseignant, 2H de bilan en fin d’année. La ”maîtrise d’œuvre” a été déléguée à une entreprise dirigée par une auto-entrepreneuse issue du secteur des ressources humaines qui propose des ateliers de connaissance de soi et de développement personnel, lesquels se réduisent très souvent à des exercices infantilisants inspirés des techniques psychologisantes comme la programmation neuro-linguistique.

Les livrets d’activités distribués regorgent des poncifs éculés du management et du développement personnel et comprennent des fautes d’orthographe et de syntaxe.La maîtrise du français ne semble pas y être la priorité.Les 18 entreprises partenaires relèvent toutes du privé, beaucoup appartenant au secteur agro-alimentaire. Aucune administration publique n’est partenaire. Les entreprises privées semblent s’inscrire dans une logique de pré-recrutement. Les professionnels de l’Éducation nationale, et en premier lieu les psychologues-conseiller.es d’orientation (PSY-EN), sont marginalisé.es. Les professeurs principaux voient l’organisation d’une partie de leurs missions prescrite par des acteurs extérieurs au monde de l’éducation. Des intervenants extérieurs prétendent ainsi “apprendre à apprendre” à des professionnels de l’enseignement expérimentés.

Ecl’or est au diapason à la politique ministérielle actuelle. En effet, à Michel Ragon et à Jules Ferry, les collègues impliqués dans le projet Eclor sont majoritairement incité.es à être signataires du Pacte, ce qui accentue les fracturations entre personnels...

Que faire ?
– avertir la section départementale.
– tenter de convaincre, en priorité, les collègues de ne pas s’engager dans ce projet ; et lorsqu’ils le sont déjà, de reprendre la main sur certaines activités et sur le contenu de certains ateliers.
– refuser les réunions en dehors du temps de travail.
– intervenir collectivement au sein des conseils d’administration de ces établissements afin de donner à voir les réalités de ces dispositifs et leurs conséquences sur l’organisation pédagogique.

Ne laissons pas l’École être investie par des entreprises érigées en potentats locaux dans des perspectives qui assujettissent les enseignements et amenuisent les perspectives des élèves, a fortiori par des discours contestables sur le vivre ensemble et le développement personnel qui pourraient laisser à penser que la responsabilité repose sur les seuls individus (élève, parent, professeur).